Maître Eckhart est à n’en pas douter un maître en détachement. Je m’évertue quotidiennement à me dépouiller de livres, de nourriture parfois, d’habits. Bref, je crois que l’attachement me lie toujours à l’extérieur, au matériel. Mais le suprême attachement, c’est celui qui me ligote à moi-même, au petit personnage que je crois être. C’est pourquoi je trouve un tonique rappel en ses lignes. Dans les Entretiens spirituels, il écrit : « En vérité, si un homme abandonnait un royaume et le monde entier et qu’il se garde lui-même, il n’aurait rien abandonné. » Pourquoi ne pas commencer par rire un petit peu du bonhomme que je suis et prendre un peu mes distances à son endroit ? Se détacher de soi par le rire, voilà qui n’est pas sans charme ! Encore ne faut-il pas s’attacher, même pas à ce joyeux chemin !
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jean devriendt (maitre.eckhart.free.fr)
Lundi 4 octobre 2010 à 23 h 50 min
Le détachement d’Eckhart est au-delà de l’acte, il saisit l’être. Il faut se détacher aussi des images, même des grandes images de dieu fabriquées en nous. Et tout ceci a un but : enfanter le verbe en nous en devenant par grâce ce que Dieu est par nature ! Vaste programme. Quant à l’humilité, ce n’est pas l’humiliation. Être heureux d’être soi, et heureux que les autres soient ce qu’ils sont, c’est le premier pas. On n’a jamais vu deux vertus s’opposer. La joie est le premier pas vers l’humilité. Puis la colère contre tout ce qui est mauvais, sans distinguer entre soi et les autres. La sainte colère, calme et bienveillante, joyeuse et entièrement constructive. C’est tout cela aussi le détachement, car tout va par paire antinomique surtout chez Eckhart, et le détachement n’est rien sans l’amour. Eckhart le dit dans « l’oeuvre des sermons » : qui peut prétendre aimer son prochain en ne s’aimant pas soi-même ?
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