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Ecosia : Le Moteur De Recherch

17 mars 2010 3 17 /03 /mars /2010 10:45

* « Pour un homme cultivé, voir une farce c'est comme jouer à la loterie, sans le désagrément de gagner de l'argent. » La reprise, 1843.

* « Il ne faut pas dire du mal du paradoxe, passion de la pensée : le penseur sans paradoxe est comme l'amant sans passion, une belle médiocrité. » Miettes philosophiques, 1844.

* « Croire, c'est, étant soi-même et voulant l'être, plonger en Dieu à travers sa propre transparence. » Traité du désespoir, 1849.

* « La raison d'être de la chrétienté [Église établie, institutionnelle telle que « l'Église danoise » par exemple] est de rendre si possible le christianisme impossible. » L'instant, mai 1855.

 

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16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 19:21
Comprendre Kierkegaard

Pourquoi revenir à Kierkegaard ? Dans le contexte présent de désarroi de la pensée, sa philosophie, naguère rangée au rayon d'un existentialisme ou d'un pré-existentialisme dont les pensées de transformation du monde auraient eu raison, a retrouvé une franche actualité - que signe l'inscription de Kierkegaard dans la liste des auteurs susceptibles d'être étudiés dans les classes de terminale. Beaucoup moins diluée et « littéraire » qu'on s'est plu à le croire, sa pensée demande désormais tant un effort d'exégèse qu'une approche résolument orientée par un souci de confrontation au contemporain. C'est à cette double exigence que répond le présent ouvrage.
Au fil d'un parcours herméneutique de haute tenue, France Farago montre combien Kierkegaard, philosophe de la genèse de soi, sait retrouver la valeur de l'intériorité et de la subjectivité vivante. Déjouant l'abstraction de la rationalité moderne qui stérilise notre rapport au monde, cet exégète parmi les plus éclairants du christianisme réactualise le message existentiel de la tradition spirituelle occidentale et répond à notre angoisse d'hommes tardifs écartelés entre la déconstruction des modèles et la volonté de réédification.
Ce livre, accessible à ceux qui s'initient à la philosophie comme aux littéraires, s'adresse aux étudiants et aux enseignants du secondaire soucieux de faire connaître Kierkegaard à leurs élèves ainsi qu'à tous ceux qui s'intéressent de près à cet auteur ou réfléchissent en général sur les réponses à apporter au malaise contemporain de la pensée.

France Farago, agrégée de philosophie, enseigne en classes préparatoires aux ENS au Lycée Chaptal à Paris.

Edition: Armand Collin - Coll: Cursus

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16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 18:38

SÉMINAIRE MÉTHODOLOGIE ET ÉPISTÉMOLOGIE

PSYCHANALYSE ET PSYCHIATRIE

 

La psychiatrie et la psychanalyse posent des problèmes méthodologiques et épistémologiques spécifiques. Ce séminaire veut s’emparer de ces questions pour interroger leur singularité dans le souci de dégager et de suggérer des indicateurs pertinents pour préciser ce qui les caractérise.

 

Vendredi 9 Avril 2010 – 21h-23h ;

Grand amphithéâtre CMME, CHS Sainte Anne, 100, rue de la Santé 75014 Paris ;

 
Conférence de  
Jean-Pierre BOURGEOIS,
Directeur de Recherche, CNRS-Institut Pasteur
« Synaptogenèses et individuation (Questions d'un neuroscientifique à la psychologie, à la psychiatrie, à la pédopsychiatrie et à la psychanalyse) »

discutants : Bernard Golse & Alain Vanier
 



Entrée libre

 
Comité d’organisation : Didier Dreyfuss, Bruno Falissard, Bernard Golse, François Marty, Jean-Christophe Thalabard, Alain Vanier, avec la collaboration d’Arnold Munnich
.
 
• UFR Médecine Paris Descartes (CHU Necker Enfants Malades) – Université Paris Descartes – Paris V

• UFR Médecine Paris Diderot – Université Paris Diderot – Paris 7

• Centre de Recherches Psychanalyse et Médecine (CRPM) – Université Paris Diderot – Paris 7

• Laboratoire de Psychologie clinique et psychopathologie – Université Paris Descartes – Paris V

• INSERM – Unité 669


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14 mars 2010 7 14 /03 /mars /2010 04:59
LE SABRE ET LE GOUPILLON
Paroles et musique: Jean Ferrat


Comme cul et chemise comme larrons en foire
J'ai vu se constituer tant d'associations
Mais il n'en reste qu'une au travers de l'histoire
Qui ait su nous donner toute satisfaction

Le sabre et le goupillon

L'un brandissant le glaive et l'autre le ciboire
Les peuples n'avaient plus à se poser de questions
Et quand ils s'en posaient c'était déjà trop tard
On se sert aussi bien pour tondre le mouton

Du sabre que du goupillon

Quand un abbé de cour poussait une bergère
Vers des chemins tremblants d'ardente déraison
La belle ne savait pas quand elle se laissait faire
Qu'ils condamnaient l'usage de la contraception

Le sabre et le goupillon

Et maintes éminences et maints beaux capitaines
Reposaient le guerrier de la même façon
Dans le salon chinois où Madame Germaine
Grâce à ses pensionnaires réalisait l'union

Du sabre et du goupillon

C'était le temps rêvé de tous les militaires

On leur offrait des guerres et des expéditions
Que de manants joyeux sont partis chez Saint-Pierre
Le coeur plein de mitraille et de bénédictions

Du sabre et du goupillon

Quand ils s'en revenaient et d'Asie et d'Afrique
Ils faisaient régner l'ordre au sein de la nation
Les uns possédaient l'art d'utiliser la trique
Les autres sans le dire pensaient qu'elle a du bon

Le sabre et le goupillon

On ne sait plus aujourd'hui à qui faire la guerre
Ça brise le moral de la génération
C'est pourquoi les crédits que la paix nous libère
Il est juste qu'il aillent comme consolation

Au sabre et au goupillon

L'un jouant du clairon l'autre de l'harmonium
Ils instruiront ainsi selon la tradition
Des cracks en Sambre et Meuse des forts en Te Deum
Qui nous donneront encore bien des satisfactions

Du sabre et du goupillon

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14 mars 2010 7 14 /03 /mars /2010 01:37

Stimulation

 

Réflexion à rebours -donc passionnante-, de Montaigne au chapitre XIII des Essais (premier tome) : il sait au gré au sort de ne pas l'avoir fait vivre "dans un siècle languissant et oisif". Ainsi, les calamités auxquelles il a assisté ont plus animé qu'accablé sa santé, comme si celle-ci s'était affermie au contact d'un monde lui-même malade. Le propos concerne aussi la pensée qui, affectée par les barbaries du temps, prend conscience de la réversibilité des opinions et des jugements, se frayant un chemin pour aboutir à la nuance et la pondération. S'il y a une leçon à tirer des ces sanglantes guerres de religion, c'est qu'elles ont permis à un esprit original d'inventer un nouveau mode d'écriture -l'essai- et de livrer un regard totalement dépourvu de passion dans un siècle qui les déchaîna.

 

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14 mars 2010 7 14 /03 /mars /2010 01:19

Bonjour,

 

J'ai découvert Howard Bloom en lisant son livre "Le Principe de Lucifer", il me reste encore à lire le tome II qui traite un autre aspect de sa démarche de pensée.

Il est difficile de classer Howard Bloom, mais c'est évidemment avant tout un penseur disons de type "scientifique", en fait, je le trouve inclassable car il fait appel pour ses raisonnements à tous les domaines de connaissances. Si je vous en parle ici c'est parce que j'estime qu'il mérite d'être connu, notamment dans le domaine de la pensée philosophique .

 

Pour le découvrir je vous propose un entretien (écrit) en ligne dont je vous donne ci-dessous le lien, c'est une bonne première approche, à mon avis .

 

Bien à vous,

Dominique .

 link

 

 

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13 mars 2010 6 13 /03 /mars /2010 09:47
Bonjour ,

Voici un bon article écrit par Nicolas Rouillot sur le pensée de Martin Heidegger . C'est un article qui me parait trés clair
à comprendre, ce qui est suffisamment rare sur les textes traitant de la pensée de Mr Heidegger pour que je me donne la peine de le signaler .

Bien amicalement,

Dominique Giraudet

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Heidegger ou la destruction de la métaphysiquelink

Le § 6 de Etre et temps s'intitule « La tâche d'une destruction de l'histoire de l'ontologie ». Il s'agit pour Martin Heidegger de présenter ce que doit impliquer une destruction (Destruktion) de l'histoire du discours sur l'être (c'est-à-dire de l'ontologie). En effet, dans la pensée grecque qui inaugure la naissance de la philosophie occidentale, la question de l'être des choses est la question fondamentale qui conditionne toute élaboration philosophique. Platon et Aristote cherchent à savoir « ce que sont les choses », c'est-à-dire à déterminer ce qu'est la vérité du monde et de nous-mêmes. Savoir ce que l'on est ainsi que se connaître soi-même font partie intégrante de ce questionnement l'être.

 

Cependant, Heidegger remarque que cette question a été trop souvent oubliée dans l'histoire de la philosophie. Les grandes philosophies modernes se déploient en effet sur un fond de concepts (Dieu, l'âme, le monde) où la question de l'être ne fait plus problème. La philosophie devient un simple discours sur l'étant des choses, c'est-à-dire un discours où l'être va de soi et ne pose plus problème. Pour cette raison, il dénonce la philosophie moderne comme une onto-théologie, un discours qui ne se pose plus la question de l'être, mais qui se referme dans une conception théologique de l'être, où l'être est posé de façon dogmatique comme objet.

 

La destruction est une tâche que doit se donner la pensée pour se défaire de la tradition des concepts de la philosophie (Dieu, l'âme, le monde), et ainsi revenir aux expériences originaires qui ont présidé à la constitution des concepts philosophiques, et notamment ceux de la philosophie grecque. Il s'agit donc de revenir à l'une des plus fondamentales questions de la philosophie, voire peut-être à la question qui donne son sens à toute recherche philosophique : « qu'est ce que l'être ? ».

 

La destruction entraîne une répétition sempiternelle de la question de l'être dans l'objectif d'approfondir l'être à partir du temps. Ce que fondamentalement Heidegger a compris, c'est que toute philosophie de l'être était solidaire d'une histoire et d'une temporalité. Dans la philosophie moderne, on a toujours cru possible de dire l'être indépendamment du moment historique dans lequel se déployaient les concepts. L'être était pensé sans le temps. Or Heidegger montre qu'il y a une histoire de la philosophie, et une détermination des concepts qui est non seulement propre à une époque mais aussi à une existence humaine, celle du philosophe. On ne peut donc plus faire comme si le philosophe révélait la vérité telle qu'elle est indépendamment du temps propre à l'existence humaine.

 

Ainsi de la même façon que Deleuze a montré qu'il y avait une géographie de la philosophie, on peut dire qu'Heidegger a montré qu'il existe une histoire de la philosophie. Ce constat incite à prendre en compte l'idée que nous informons l'être en fonction du temps et du lieu où l'on se trouve. D'où l'importance de continuer à se reposer la question de l'être à chaque époque.

 

Heidegger propose de repartir de ce constat pour élaborer une philosophie qui puisse prendre en compte cette dimension historique. Il nous invite ainsi à détruire la métaphysique telle qu'elle s'est bâtie, c'est-à-dire sur une conception de l'être qui nie la dimension temporelle de l'existence.

 

Cette destruction n'est cependant pas entièrement négative. La destruction heideggérienne ne laisse pas place à un champ de ruines. Heidegger détruit la philosophie pour répéter une question qui est importante en vue de reconstruire une philosophie prenant en compte l'existence historique de l'homme et son rapport problématique à l'être. C'est en ce sens que Derrida a proposé comme traduction du terme allemand Destruktion la déconstruction. La déconstruction heideggérienne a stimulé et stimule encore toute une réflexion philosophique qui se donne pour tâche de lire les textes d'une manière originale, en essayant d'opérer une actualisation des concepts en les insérant dans leur trajectoire historique.

Publié par Nicolas Rouillot à l'adresse 17:46

Libellés : histoire, temps, être

 

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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 19:59
Bonjour,

Voici un bon article sur la démarche philosophique de Jostein Gaarder .

Bien amicalement,

Dominique Giraudet

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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 16:26

RETOUR : Entretiens de La Mètis   link

 

Dominique Janicaud : Entre soleil et mort.

 

Cet article a été publié primitivement dans la revue La Mètis, que dirigeait alors Maryline Desbiolles (nº 10 « Les Confins », décembre 1993). Il a été repris dans le beau volume d'essais, Aristote aux Champs-Élysées : promenades et libres essais philosophiques, Encre Marine, 2003.

 

Professeur de philosophie à l'université de Nice, Dominique Janicaud est l'auteur de grands livres : Hegel et le destin de la Grèce, Vrin, 1975 ; Ravaisson et la métaphysique : une généalogie du spiritualisme français, réédition Vrin, 1997 ; La Puissance du rationnel, Gallimard, 1985 ; L'Ombre de cette pensée. Heidegger et la question politique, Millon, 1990 ; Chronos. Pour l'intelligence du partage temporel, Grasset, 1997 ; La Phénoménologie éclatée, Éd. de l'Éclat, 1998 ; Heidegger en France, 2 volumes, Albin Michel, 2001…).

 

Sous le titre La Phénoménologie dans tous ses états, Gallimard, coll. Folio-Essais, 2009, on vient de réunir ses deux essais sur l'histoire de la phénoménologie française, Le Tournant théologique de la phénoménologie française et La Phénoménologie éclatée, précédemment publiés par les Éd. de l'Éclat, en 1990 et 1998.

Dominique Janicaud est décédé en 2002.

 

Nous remercions vivement Madame Nicole Janicaud et Maryline Desbiolles de nous avoir autorisé à reprendre cet article sur ce site.

 

Mis en ligne le 25 novembre 2008.

 

© : Nicole Janicaud et Maryline Desbiolles.

Entre soleil et mort

 

À la mémoire de Reiner Schürmann

 

 

 

Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement.

 

La Rochefoucauld

 

Plus d'une fois, en resongeant à ce mot (sans doute le plus audacieux dans le coffret armorié des Réflexions ou sentences et maximes), j'ai senti une étrange perplexité, comme un cillement après l'éblouissement. Étais-je déçu et presque frustré que l'aphorisme souverain désarmât tout épilogue ? L'ellipse capture l'intensité de la pensée : mais, si un viatique s'y abrite, le temps doit permettre d'en distiller la richesse, comme pour faire porter au mystère ses fruits.

 

Revenir à l'aphorisme, est-ce le soupçonner, au lieu de lui rendre justice une fois pour toutes ? Si l'écrivain n'avait fait que forcer une antithèse pour étonner, nous ne serions pas si portés à interroger ses effets. Mais ici, voici le soleil, la mort, notre regard vacillant : si peu de mots pour donner à penser la plus brutale des évidences !

 

 

 

Perplexités et soupçons qui s'expliquent sans doute par l'extrême difficulté d'affronter la mort, l'épreuve d'endurer sa méditation, le péril même de la nommer. Ce mot eût-il seulement signalé cette échappée suprême, l'interdit scellant le mystère - Orphée à jamais détourné d'Eurydice, le regard suppliant suspendu -, j'eusse été moins déconcerté. Ou bien, il eût été tentant de recourir au songe, ce passeur, pour confier à quelques mots plus bruissants le Sésame des portes de corne closes sur l'empire du silence. Pépier comme mille oiseaux dans de grands arbres au bord d'un lac immense, avant l'envol pour l'ultime migration ? Biaiser, détour de comète, pour glisser dans l'azur profond avec les êtres chers ?

 

 

 

Nous luttons contre un ennemi invisible, inconnu, inqualifiable et duquel nos mots ne sauraient se saisir. Il nous cerne et nous ne le discernons pas. Faut-il donner forme et contour à ce défaut radical, irrémédiable exténuation ? Le temps porte ses mains à notre gorge et les referme si lentement que souvent nous les oublions. Et si ces mains n'étaient que celles d'un vide que nous ne connaîtrons jamais, puisque nous n'en faisons l'expérience qu'à travers la disparition d'autrui ?

 

À chaque proche départ, nous partons aussi (comme lorsque nous ne savons pas si bouge notre train ou le voisin). Violemment une disparition entraîne vers l'anéantissement, ou insensiblement vers le désir de rejoindre qui s'est trop cruellement absenté. Regarder encore ce qui vibre en pleine lumière : brin d'herbe, fleur ou geste enfantin, c'est déjà survivre, suivre, comme malgré soi, de nouvelles images du film incertain de la vie.

 

 

 

La mort : soleil noir ? Hypothèse trop rhétorique, rapprochement contre nature, magnification trop vite prononcée de Thanatos ! Si le cœur croit se bronzer à son approche, il ne recueille que le souffle vain de sa propre audace au bord du rien. Accompagner autrui aussi loin que possible dans ce déclin définitif est une expérience qui rend suspecte l'emphase au profit de la mort : tentation des rites et des discours. Coup de disgrâce : transformer ce scandale en pôle négatif ou en étape métaphysique révèle un manque de pudeur, ou de doigté, envers cet insaisissable effacement.

 

 

 

La fin de Tolstoï dans la gare d'Astapovo est comme la ligne de fuite de toute pensée de la mort, consciente de l'impitoyable. Elle renferme à la fois le piège et l'échappée, le désir de se délivrer (de la société ? du lieu ? du corps ? du destin lui-même ?) et le fait dénudé de l'échec, ces malaises et ces effondrements qui vous emportent dans les conditions les plus absurdement médiocres.

 

Il ne faut pas idéaliser cette mort. Elle fut probablement atroce. On a pourtant le droit (puisqu'on est, pour l'instant, extérieur à un tel drame) d'y voir comme un exemple (non un modèle) de ce détour que nous aimerions prendre, mais dont nous ne savons pas s'il nous sera accordé. Ne pas mourir fonctionnellement dans un hôpital ou un mouroir, mais en route… Il y a, dans l'ivresse, une façon de mimer cette fuite éperdue, ce détour (presque) réussi, dernier écart avant le saut définitif.

 

 

 

À l'encontre de la tradition qui tend à faire de la vie (en voie d'amendement ou de rachat) une méditation de ma mort, substituer la discrétion à l'emphase. Ménager l'ultime transition, comme doucement s'éteint chez Mahler l'adieu, le soir, à la fin du Chant de la terre (Ewig, Ewig…). Ne pas transformer la vie en salle d'attente de la radicale dépossession ! Lui faire seulement (ce qui est déjà beaucoup) subir l'épreuve du contre-jour.

 

 

 

Hélios, tu sais quelque chose d'aigu de la vie même et redonner le goût de la jeune lumière jusqu'à l'enivrement. Parfois, liane délicieuse, tu m'enveloppes le corps, cuisant sa nudité comme un pain savoureux. Tu as l'art des déclins caressants. Mais comment oublier les brûlures sans pitié, imaginer les intenables éruptions ? Distance, distance… Depuis que nous te savons mortel, notre intelligence a cru te dompter. Nous avons appris à regarder au-delà de toi des mondes innombrables. Tu n'es que le seuil de l'immensité.

 

 

 

Fût-ce un instant, le rapprochement d'Hélios et de Thanatos a ébloui, faisant oublier que la lettre du mot de La Rochefoucauld ne fait qu'énoncer une impossibilité, celle d'un regard constant et fixe porté sur eux. Aucune contemplation soutenue de la source de nos jours ni de leur terme. Soleil et mort ne sont coalisés que pour nous aveugler.

 

Quelques mots balaient tout savoir de surplomb. Aucune complicité à l'égard de la meditatio mortis. Mais le constat sec de l'impossibilité du regard contemplatif laisse toute latitude à l'instantané. Ni l'éclat solaire ni la pensée du retranchement n'interdisent toute surprise du regard, tout dérobement. Approches ombreuses, ruses soudaines pour trouver ces voies transversales dont Proust remarque qu'elles permettent sans cesse des rapprochements insoupçonnés entre les êtres, les événements, les versants de l'existence, comme dans les forêts les « étoiles » des carrefours et, entre celles-ci, les sentiers de traverse, en un réseau démultiplié par la vie elle-même et notre attention à ses tours.

 

 

 

L'insolite alliance du soleil et de la mort ne conquiert sa négative puissance que de notre illusoire volonté de contempler un fond des choses ou de fixer ce qui ne saurait l'être. Notre chance : diviser Hélios et Thanatos, ces ennemis trop puissants, nous glisser entre leurs fascinations, ourdir l'intelligence de leurs discordes et de nos limites. À cette lumière contrastée, la ligne d'horizon de la mortalité se déplace, mais plus nettement dessinée que jamais ; les forces et les rumeurs de la vie ne vibrent que plus intensément.

 

 

 

Ne pas oublier que La Rochefoucauld s'adressait à une société pour laquelle la dernière partie de la vie (très tôt…) devait être une préparation à bien mourir. Il fallait en prendre le temps et, à cette fin, se retirer du « monde ». Du moins était-ce le modèle que l'Église réussissait à rendre dominant et que La Rochefoucauld rejette en le négligeant : renvoi de l'ascète ou du pieux vieillard à une impossibilité qui tient à notre condition rendue à sa radicalité. La mort n'est pas un objet d'étude ; elle n'est pas non plus une antichambre. Cryptes, sombres cathédrales, cellules silencieuses : autant de degrés dans l'illusion.

 

 

 

Mais ce mot est exposé à une autre méconnaissance : la grisaille qui enveloppe notre décès rend anachronique toute pensée, même héroïquement instantanée, de la mort. Le regard médicalisé éteint tout autre temps et tout autre lieu que sa neutralité. Le tranchant de la mort n'est plus exorcisé par l'au-delà : rendu insignifiant par sa technicisation. L'inversion de perspective entre le dix-septième siècle et le vingtième ne change pas le privilège que garde La Rochefoucauld : être intempestif.

 

 

 

Mortel, parier contre la mort, sans ignorer l'issue du combat. Voir et ne pas voir la mort en face.

 

Plus que son offrande au soleil, la nudité ultime est le détachement du cœur surpris plutôt qu'effrayé par son destin, étoilé comme une nuit d'été. Entourer le soleil d'égards et de distance, en cette heure de désir assourdi et d'angoisse aux aguets où le passage se fera. Songer à qui donner la main pour glisser dans l'immensité.

 

Dominique Janicaud

 

RETOUR : Entretiens de La Mètis

 

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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 16:19
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Autrement dit, au chapitre Humilité, pp. 84-86 :

 

“Prendre la parole, écrire et publier, ce ne serait plus, alors, contredire cette « humilité », mais, en quelque manière, s’expliquer avec elle, se livrer à son mystère. Ce serait se convaincre que la liberté intérieure, de pensée et de parole, n’est pas d’abord une conquête dont on peut jouir selon sa fantaisie, mais un devoir — pour autant qu’on le rapporte à la source dont je parlais. Elle est aussi, cette liberté, une manière de miracle, une grâce.”

© Ronald Klapka _ 13 septembre 2009

 

 

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