|
|||||
|
|||||
![]() Sören Kierkegaard (1813-1855), philosophe et théologien danois, est considéré comme le père de l’existentialisme. Dans ce livre, qui ne se veut qu’introduction à son œuvre, on rappelle en premier lieu le contexte historique, social et philosophique, dans lequel sa pensée s’est formée. On propose ensuite un itinéraire philosophique à travers les stades de l’existence et un parcours thématique où sont abordés les concepts fondamentaux de Kierkegaard : l’angoisse, l’ironie, la liberté, la responsabilité, le choix, l’authenticité, le désespoir, la finitude, l’Histoire, la communication indirecte. On insiste sur l’apport de Kierkegaard au débat philosophique en explicitant son appel au “devenir chrétien”, projet existentiel qui donne sens à sa critique de Hegel : le Sujet est singulier, indéterminé, libre ; il n’est pas pièce ou moment d’un Système, il produit son horizon, il a à être. On esquisse, enfin, les prolongements contemporains de cette œuvre unique, à mi-chemin entre la littérature et la philosophie, entre la logique et l’intuition mystique, qui a eu tant d’influence sur Gabriel Marcel, Jean-Paul Sartre, Karl Barth, Martin Heidegger, Léon Chestov, Emmanuel Lévinas, et Vladimir Jankélévitch, notamment. Charles Le Blanc, germaniste et docteur en philosophie, a publié une édition critique des Fragments de Friedrich Schlegel et Le miroir de l’âme, recueil de pensées de Lichtenberg.
|
416 pages
ISBN : 2-35176-014-X
PRIX : 24 €
FORMAT : 14 X 21.5
AUTEUR : Jeffrey Andrew Barash
TRADUCTEUR(S) : Sylvie Taussig
DATE DE PARUTION EN VO : 2003
DATE DE PARUTION : 9 fév 2006
Diffusion Seuil / Volumen
Bibliographie
Sources
Préface
Heidegger et son temps : voici l’enjeu de l’étude mise en œuvre par J. A. Barash.
Prenant appui sur des textes rares et des correspondances inédites, J. A. Barash propose une interprétation de l’œuvre de Heidegger, à partir d'une reconstruction du paysage philosophique du
début du XXe siècle, puis de l'entre-deux-guerres. Ainsi le lecteur trouvera-t-il un exposé remarquablement articulé du grand débat suscité en Allemagne, avant et après la Première
Guerre mondiale, par le problème du sens de l’histoire. Cette reconstruction vise à établir des continuités souterraines entre l'œuvre de Heidegger et son environnement intellectuel.
Rappelons que ce philosophe, dont la lecture est particulièrement difficile, fut l’objet d’une intense polémique en raison de ses relations ambiguës avec le nazisme. Il n’en est pas moins
l’un des penseurs les plus importants du XXe siècle.
J. A. Barash a enseigné aux universités de Chicago et de Columbia. Puis il a été chercheur à l'institut universitaire européen de Florence et à l'université de Bielefeld (RFA). Il enseigne actuellement à l'université de Picardie (Amiens).
En savoir plus sur Jeffrey Andrew BarashLE MONDE | 25.06.07 | 16h21 • Mis à jour le 25.06.07 | 16h21
Il fut, ces dernières années, parmi les plus vigoureux opposants à l'administration Bush et à la droite religieuse, et un critique acerbe de l'évolution du Parti démocrate et de son absence de vrai projet politique.
Richard Rorty revendiquait l'héritage des Pères fondateurs de la démocratie américaine, Jefferson, Lincoln, mais aussi de Roosevelt, Martin Luther King, contre une image dégradée de l'Amérique qui, selon lui, nourrissait à tort l'antiaméricanisme. En cela, il était avant tout l'héritier du pragmatisme, et de John Dewey, dont il n'a cessé de promouvoir et d'actualiser les idées. Rorty aimait l'Amérique et l'espérance sociale qu'elle signifiait à ses débuts - le titre d'un de ses derniers livres est Philosophy and Social Hope (1999). L'espoir, l'optimisme même, en dépit de toutes les déceptions, indissociables d'un refus solidement ancré de l'injustice : dès l'âge de 12 ans, raconte-t-il dans son beau texte autobiographique, Trotski et les orchidées sauvages, il savait "que l'intérêt d'être humain était de passer sa vie à combattre l'injustice sociale".
On demande parfois s'il y a des intellectuels, au sens strict, aux Etats-Unis : c'est la question que posait le premier philosophe américain, Ralph Waldo Emerson, dans son discours de 1837 The American Scholar, "déclaration d'indépendance intellectuelle" qui appelait à l'émergence d'une pensée américaine autonome par rapport aux traditions et prestiges de l'Europe, libre de réinventer la démocratie. Rorty était sans doute le seul philosophe américain, avec Stanley Cavell, qui veuille répondre à l'exigence d'Emerson : un intellectuel public, qui exprime à la fois l'aspiration d'indépendance de l'Amérique et sa capacité de discussion interne ; qui illustre la puissance du discours, et le bouillonnement des formes de la vie ordinaire et politique.
UN PARCOURS INHABITUEL
Le parcours de Rorty tranche dans le paysage parfois conventionnel de la philosophie américaine contemporaine. Elevé dans une famille où l'on vénérait Trotski à l'égal d'un dieu, Rorty avait deux passions : la conversation démocratique et les orchidées sauvages, dont il connaissait un nombre important de variétés. Cette conjugaison du public et du privé, du robuste démocratique et de l'ésotérique délicat, pourrait définir son style de pensée et d'écriture.
Son usage du pragmatisme est également ambivalent - critique et constructif. Rorty, dans son ouvrage le plus discuté, L'Homme spéculaire (Philosophy and the Mirror of Nature, 1979), puis dans Conséquences du pragmatisme (1982) rejetait le fonds "représentationaliste" commun à la philosophie traditionnelle et à la philosophie analytique : utilisant James, Dewey, Wittgenstein, Austin, mais aussi des arguments tirés de Sellars, Quine et Davidson, il critique l'idée de la connaissance comme représentation, "miroir" de la nature - constitué à partir d'un donné empirique que notre esprit, notre langage travailleraient de façon à atteindre le vrai.
Ses idées sont encore au centre des discussions présentes sur le "contenu conceptuel". Reprenant des thèmes de la philosophie analytique - vérité, sens, objectivité -, Rorty définissait, avec d'autres penseurs américains comme Cavell et Putnam, ce qu'on a appelé l'esprit "postanalytique", une transformation dans la pensée américaine aussi importante que l'introduction du positivisme logique dans les années 1940. A la différence d'un Quine, qui a voulu combiner empirisme et pragmatisme, Rorty a utilisé les ressources pragmatistes et les outils du "tournant linguistique" pour démythifier la fascination pour la science et la peur du relativisme, recentrer notre attention sur les pratiques et les ajustements aux situations, enfin ébranler les certitudes d'une philosophie analytique "professionnelle" devenue (intellectuellement et politiquement) conformiste.
Le versant positif de l'héritage pragmatiste est la constitution d'une rationalité communautaire et conversationnelle, définie par Rorty comme une extension progressive de la solidarité, du refus de l'injustice et de la cruauté : par un travail sur nos usages, une nouvelle sensibilité à nos vocabulaires, à nos modalités d'expression. Il définit joliment son idéal comme "romantic bourgeois liberal" : cultiver notre sensibilité à la souffrance et notre capacité langagière à la décrire.
Rorty a toujours suscité, voire provoqué, la critique et le débat. Cela correspondait à son idéal de la discussion critique, souvent revendiqué par les philosophes mais rarement mis en oeuvre. Il disait que si on pouvait définir la meilleure position intellectuelle comme celle qui était attaquée aussi vigoureusement par la droite que par la gauche, il était bien parti : dénoncé par les conservateurs comme irrationaliste et dangereux, par la gauche comme élitiste et proaméricain. Son interprétation du pragmatisme a été contestée par ceux qui en voulaient un usage plus normatif ; son ironie vis-à-vis des idéaux proclamés de la rationalité scientifique a été stigmatisée comme relativiste. Rorty pourtant n'a rien d'un sceptique. Il considère qu'il y a des solutions aux problèmes philosophiques dès lors qu'on les cherche dans les activités communes et non dans des théorisations et lexiques irréalistes.
L'introduction de sa pensée en France - à l'époque lointaine où les grands éditeurs traduisaient les livres importants - a suscité bien des débats au sein d'une communauté philosophique qui commençait à s'installer et hésitait à s'ouvrir à une critique interne.
On a pu avoir l'impression que Rorty traversait la division bien établie entre philosophie analytique et "continentale", mais, en dépit de son intérêt pour Heidegger, Nieztsche, Derrida, Gadamer, il reste l'héritier des grandes traditions de pensée américaines, d'Emerson à Dewey, de Sellars à Quine. Comme le dit Cavell : "Qu'on soit d'accord avec lui ou non sur tel ou tel point, Richard Rorty a été le philosophe américain, après Dewey, qui a montré de façon la plus accomplie et féconde que la philosophie était inextricable du discours public américain. Je lui en suis pour toujours reconnaissant."
Rorty, amoureux de l'Amérique, ami de l'humanité, voyait encore dans son pays, et dans la philosophie, "une ouverture sur des paysages démocratiques illimités". Il manquera à la vie philosophique commune.
Morceau choisi
Tout questionnement essentiel de la philosophie demeure nécessairement inactuel. Et ceci, ou bien parce que la philosophie se
trouve jetée loin en avant de son propre aujourd'hui, ou bien encore parce qu'elle re-lie l'aujourd'hui à son 'ayant-été' ancien et originaire. Dans tous les cas la philosophie reste un savoir qui non seulement ne se laisse pas rendre actuel, mais dont il faut bien plutôt dire
l'inverse : qu'il subordonne l'actualité à sa mesure. La philosophie est essentiellement inactuelle parce qu'elle appartient à ces rares choses dont le destin est de ne jamais pouvoir rencontrer
une résonance immédiate dans leur propre aujourd'hui, et de ne jamais non plus avoir le droit d'en rencontrer une. Lorsque quelque chose de tel semble se produire, lorsqu'une philosophie devient
un mode, alors, ou bien il n'y a pas philosophie véritable, ou bien celle-ci est détournée de son sens et utilisée abusivement, selon les besoins du jour, à des fins quelconques qui lui sont
étrangères.
- chapitre : La question fondamentale de la métaphysique - page : 20 - éditeur : Gallimard - date d'édition : 1967 -