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Ecosia : Le Moteur De Recherch

12 avril 2010 1 12 /04 /avril /2010 17:37
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Klaas HendrikseAprès bien des hésitations, l’Eglise protestante des Pays-Bas vient d’autoriser Klaas Hendrikse à continuer à être pasteur et à prêcher bien qu’il proclame haut et fort son athéisme ! Il est vrai que cet athéisme est en partie relatif, mais ce qui a probablement décidé les responsables de l’église hollandaise c’est le fait que ce pasteur attire des foules (il attire aussi bien des critiques, évidemment).
 
Après la mort, il n’y a rien. La résurrection n’est qu’un mythe provenant d’antiques croyances liées au lever et au coucher de l’astre solaire. Jésus est certes une figure historique, il a sans doute été un personnage marquant, mais il n’a rien d’unique. Dieu n’existe pas, tout le démontre. Toutefois, il est possible de croire en un Dieu qui n’existe pas.

Le pasteur protestant qui professe ce credo sulfureux s’appelle Klaas Hendrikse. Agé de 63 ans, il est divorcé et père de deux enfants. Grand, mince, d’allure sportive, les cheveux blancs encadrant un visage bronzé – il revient d’Espagne où sa sœur a une maison –, c’est un homme posé et réfléchi. Ne craignant pas le potentiel explosif de l’oxymoron, il se définit comme un «croyant athée», et vit à Middelbourg, une charmante petite ville de 46 000 habitants, chef-lieu de la province de Zélande aux Pays-Bas. Depuis qu’il a fait son coming out mécréant dans un livre* publié en 2007, il est devenu un phénomène de société. Des journaux ont comparé sa situation à celle d’un boucher qui serait végétarien, ou d’un boulanger sans farine. On vient de tous les Pays-Bas, parfois par cars entiers, pour l’écouter prêcher à Middelbourg, ou à Zierikzee, l’autre paroisse dans laquelle il est actif.
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La première édition de son livre s’est envolée en une journée. La treizième sera bientôt disponible. 34 000 exemplaires ont été vendus. Un succès considérable pour un ouvrage de théologie.

Cette réussite a-t-elle fait réfléchir l’Eglise protestante néerlandaise? Après la parution du livre, elle a bien envisagé une action disciplinaire à l’encontre du pasteur. Bas Plaisier, secrétaire général de l’Eglise, a même sévèrement critiqué Klaas Hendrikse, qui traite selon lui la foi chrétienne comme un «dogme que l’on peut jeter avec les ordures ménagères». Mais le pasteur athée avait le soutien de ses paroissiens. Finalement, le 3 février dernier, les autorités ecclésiastiques ont décidé qu’il pouvait rester en service jusqu’à sa retraite en 2012. Klaas Hendrikse est donc libre de continuer à clamer, du haut d’une chaire, que Dieu n’existe pas. Un cas sans doute unique dans l’histoire des Eglises chrétiennes. Et une parabole de la postmodernité séculière, un régime dans lequel l’individu refuse désormais qu’une institution lui impose ses croyances, et préfère avancer sur les chemins de la spiritualité avec des questions ouvertes sur l’infini plutôt qu’avec un paquet encombrant de dogmes.

Klaas Hendrikse est satisfait. Il a atteint son but: susciter le débat. La décision historique de l’Eglise protestante néerlandaise montre, selon lui, que celle-ci commence à prendre acte de ce qui se passe dans la société. D’après une étude réalisée en 2006 par la chaîne de télévision œcuménique Ikon et l’Université libre d’Amsterdam, un pasteur sur six ne croit plus à l’existence de Dieu ou n’est plus certain d’y croire. Et des milliers de personnes quittent l’Eglise chaque année. La raison? «Il est devenu difficile de croire dans le Dieu du théisme, c’est-à-dire en un Dieu omnipotent, omniscient, omniprésent et personnel, dit Klaas Hendrikse. Bien qu’ils ne l’admettent pas forcément, de nombreux individus sont en fait athées.»

Athée, Klaas Hendrikse l’a toujours été. «Je suis né dans une famille non croyante, mais respectueuse des croyances des autres. La région dans laquelle j’ai grandi était très orthodoxe sur le plan religieux. J’étais fasciné et impressionné par ces chrétiens qui priaient, par leurs cérémonies. Pour moi, il était évident que Dieu n’existe pas, et je me demandais pourquoi autant de gens agissaient comme s’il existait.»
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A l’heure d’entrer à l’université, ce n’est pas la théologie qui intéresse Klaas Hendrikse, mais le business. Il fait ses études à l’Université de Nijenrode, spécialisée dans ce domaine. Puis il obtient une licence à l’Université du Michigan aux Etats-Unis. Et entame une carrière chez Xerox en 1973. Bientôt, il doute de la voie qu’il a choisie. «J’étais marié, j’aimais mon travail, mais il ne me comblait pas.» Klaas Hendrikse décide alors de commencer des études de théologie en 1977, tout en poursuivant son travail chez Xerox. «Je voulais comprendre pourquoi et comment on pouvait être croyant. Je ne songeais alors absolument pas à devenir pasteur. Mais la théologie m’a beaucoup intéressé et, à la fin de mes études, j’ai choisi de changer de profession.» Klaas Hendrikse quitte Xerox en 1983. En 1984, il est consacré pasteur. «Cette décision a été difficile à prendre, avoue-t-il. Mais j’étais convaincu que je pouvais trouver ma propre voie dans l’Eglise.» Comment celle-ci a-t-elle pu accepter de l’engager comme ministre alors qu’il était athée? «A l’époque, j’étais moins affirmatif qu’aujourd’hui sur cette question. Mais mes idées libérales étaient connues de mes professeurs. On m’a accusé plus tard d’avoir menti aux autorités de l’Eglise. Je n’ai pas menti. J’évitais simplement d’aborder le sujet. Et personne ne m’a demandé de parler de mes convictions religieuses lorsque j’ai été engagé.»

Klaas Hendrikse se rattache à l’aile libérale du protestantisme. Or la théologie libérale n’accorde qu’une valeur relative aux formules doctrinales traditionnelles, et donne une grande place à l’exégèse historique, archéologique et philologique de la Bible, interprétée en toute liberté. Pas étonnant dès lors que l’athéisme du pasteur de Middelbourg ait pu passer inaperçu. Et s’il nie l’existence de Dieu, Klaas Hendrikse se passionne pour les questions philosophiques et la spiritualité.

En devenant pasteur, l’ex-employé de Xerox n’avait pas pour but de convertir ses paroissiens à ses idées, mais de les aider à vivre. Dans ce contexte, les articles de foi traditionnels ne lui sont d’aucune utilité, dit-il. «Je ne crois pas aux réponses qui ne viennent pas de nous-même. Mais chacun peut essayer de trouver les réponses à ses questions existentielles à travers ses propres expériences. Je peux accompagner les gens sur ce chemin.»

Dans ses prêches, le pasteur essaie toujours de mettre en lien les textes des Evangiles avec la vie concrète de ses paroissiens. Demain, dimanche de Pâques, il leur expliquera d’abord d’où vient le mythe de la résurrection. Il dira ensuite que Jésus est mort, qu’il a été enterré, et qu’il n’est jamais sorti de sa tombe. Que les textes concernant la résurrection de Jésus n’ont rien à voir avec la réalité, mais avec l’expérience intime des disciples du Christ. «Les personnes décédées que nous avons aimées sont toujours vivantes, commente le pasteur. C’est ce que veulent dire ces textes.» Il y aura une Cène, qui ne renverra cependant pas au dernier repas que Jésus prit avec ses apôtres. «Cette célébration évoquera le lien qui unit les hommes entre eux.» Il priera cependant le Notre Père. «C’est une incohérence par rapport à mes idées, reconnaît-il volontiers. Mais je ne veux pas me débarrasser de cette prière. On peut remplir les mots qui la composent d’une signification qui va au-delà de leur sens littéral.»
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On ne se débarrasse pas si facilement du mot Dieu, même quand on est athée, et à plus forte raison lorsqu’on est pasteur. «Ce mot est important pour moi et il fait partie de ma vie, dit Klaas Hendrikse. Je n’ai aucune raison de l’évacuer. Mais je lui donne une nouvelle signification.»

«Je nie l’existence du Dieu théiste tel que le présente la tradition chrétienne, poursuit-il. En cela je suis athée. Mais je suis aussi un croyant. Après la phrase «Dieu n’existe pas», je ne mets pas un point, mais une virgule. C’est ce qu’il y a après cette virgule qui fait de moi un croyant.»

Le ministre établit une distinction entre la croyance et le fait de croire. «La croyance est une manière de parler, de dire les choses. En revanche, croire est une manière d’être, liée à la façon dont vous réagissez à ce qui vous arrive et à ce qui se passe autour de vous. C’est la capacité de transformer un événement quelconque en une expérience qui fait sens. Dieu n’existe pas, mais il «arrive». Croire, c’est avoir confiance, en vous-même, en d’autres personnes ou dans la vie.» Un tel Dieu est forcément très personnel. Dans l’optique de Klaas Hendrikse, il ne peut y avoir de discours général sur Dieu. «Chacun a son Dieu, et mon Dieu est différent du vôtre.»

L’affirmation selon laquelle Dieu existe est d’ailleurs davantage ancrée dans le paganisme que dans la Bible, remarque le pasteur Hendrikse. «Lorsque Dieu se fait connaître à Moïse dans le livre de l’Exode, il ne lui donne pas son nom. Il lui dit: «Je suis qui je serai.» Il ne s’agit pas d’un nom, mais d’une expérience humaine. Vers le VIe siècle avant Jésus-Christ, sous l’influence des peuples polythéistes, les Hébreux ont transformé cette expérience en un dieu.»
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«Je suis qui je serai»: le pasteur Hendrikse a traduit cette expression par «va, et j’irai avec toi». C’est en effet la promesse que Dieu fait à Moïse en le renvoyant vers le peuple hébreu afin de le faire sortir d’Egypte. «Dieu est ce qui accompagne les gens», conclut le pasteur. Mais ils doivent d’abord faire l’effort de bouger, de se mettre en route. Cela signifie: «Va, ne t’arrête pas, vis ta vie, fais face à tes craintes avec confiance.»

* «Geloven in een God die niet bestaat. Manifest van een atheïstische dominee (Croire en un Dieu qui n’existe pas. Manifeste d’un pasteur athée)», Ed. Nieuw Amsterdam.

Article lu sur Le Temps

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5 Réponses à “Le pasteur qui ne croit pas en Dieu”
  1. jean claude jean claude dit :

    On peut concevoir que des pasteurs ou des prêtres ne croient plus en Dieu ; par contre peut – il exister une Eglise qui collectivement n’ait plus la foi?Je pense que non(mais ce n’est qu’un opinion) .
    Comme l’écrivait l’apôtre Paul(je cite de mémoire), si Christ n’est pas rescusité , vaine serait notre foi.

    D’ailleurs qu’est ce qui permet à ce brave homme d’écrire que tout démontre que Dieu n’existe pas ; nous savons depuis Kant que les preuves de son existence( ou de sa non existence ) ne sont pas recevables par la raison pure ; c’était l’erreur d’un Anselme de Cantorbury ou d’un Descartes de soustendre le contraire en apportant des preuves qui n’en étaient pas : mais cela fontionne également en sens inverse .Cette angoissante question formulée par Leibnitz « pourquoi quelque choe plutôt que rien » restera à jamais orpheline d’une réponse.
    C’est pour cela que notre foi s’exprime par le credo ( je crois ) et non pas je sais

    comme disait Jean Gabin c’est tout ce que je sais , mais ça je le sais !

  2. benoite benoite dit :

    Cet article met en évidence le doute que chacun traverse à un moment où à un autre, la fragilité et/ou l’isolement du pasteur, et dans le cas précis, la générosité et l’intelligence de de son église.

    en effet, le pasteur assure qu’il n’a pas la foi, mais ne démontre rien.
    son église a eu l’intelligence d’éviter le scandale, et de traiter le problème en douceur/diplomatiquement.
    plutôt qu’une mise à la retraite anticipée, elle laisse l’homme prendre ses responsabilités en quelque sorte et attendre la retraite.

    « ..Cette angoissante question formulée par Leibnitz « pourquoi quelque chose plutôt que rien » restera à jamais orpheline d’une réponse.
    C’est pour cela que notre foi s’exprime par le credo ( je crois ) et non pas je sais ».

    très juste.
    mais pour aller dans le sens de ce prêtre, on peut aussi rejoindre une autre pensée qui dirait quelque chose comme :
    « que dieu existe ou non, qu’importe ?
    l’essentiel est ce qui en reste ».

  3. La question de l’existence de Dieu ou non est une question qui est bien plus fine qu’il ne semble. Dieu n’est pas un objet ou un corps pour exister au sens commun du terme. Dieu est unique en son genre et il a un mode d’être qui est unique en son genre, comme source d’existence et non comme simplement existant en soi.

    La preuve d’Anselme de Cantorbery n’est pas bête du tout, et elle prouve au moins un aspect de l’existence de Dieu, celui d’un idéal pour l’homme, ce qui est déjà fondamental. Mais c’est vrai que cela ne justifie pas Dieu en tant qu’objet (si je puis dire) de la foi. Là c’est précisément une question de foi, une question subjective, qui n’appartient pas au champ de la preuve.

    J’ai essayé de préciser un peu ces intéressantes questions dans cet article que m’a commandé Laurent Gagnebin pour le mensuel Evangile et liberté.

  4. benoite benoite dit :

    « La question de l’existence de Dieu ou non est une question qui est bien plus fine qu’il ne semble »

    nul ne le contestera : il reste que nous faisons chacun un lecture à notre niveau, avec notre niveau de culture, nos perceptions..et notre sagesse parfois.
    la typologie de la foi me laisse perplexe, même s’ il y a une typologie aussi des visiteurs de musées..et sans doute parce qu’il est bien difficile de nous retrouver dans l’une ou l’autre catégorie tout au moins de manière définitive.
    par contre je me retrouve assez bien dans :
    « Dieu est unique en son genre et il a un mode d’être qui est unique en son genre,
    comme source d’existence, »
    c’est cela qui me semble fondamental,
    « et non comme simplement existant en soi ».

    « La preuve d’Anselme de Cantorbery n’est pas bête du tout, et elle prouve au moins un aspect de l’existence de Dieu, celui d’un idéal pour l’homme, ce qui est déjà fondamental »
    fondamental, et vital aussi à mon sens.

  5. Eric Eric dit :

    Juste une petite reflexion sur ce sujet, Dieu existe t’il?Ou est t’il bien plus que cela?
    C’est a dire est t’il l’existence meme!
    Nommer Dieu m’a toujours un peu ennuyé car pour moi il est bien plus que quelqu’un ou quelque chose que l’on pourrai nommer,c’est a dire enfermer dans un concept trop humain.
    Je pense que Paul dans sa vision premiere quand il dit que de Dieu, il voit un rien est tres juste.
    Nous en tant qu’etre crée nous pouvons etre nommés mais notre Createur?
    Personnellement Dieu pour ne pas l’enfermer dans mes propres idéaux ou concepts(toujours en mouvements) j’aime bien l’appeller « L’incréé » pour bien le demarquer de la creature.
    Mais je suis persuadé qu’il reste une part de lui en nous,une part incrée qui est a son image sans images.
    Donc on pourrait presque dire que Dieu n’existe pas (dans le concept ou l’image que l’on se fait de lui) mais qu’il EST L’EXISTENCE MEME!Et donc bien present dans la creation mais sousjacent a celle ci et faisant en fait sa vrai nature (que l’on a tendence a oublier malheureusement).

    Donc Dieu EST.
    Je crois que dans la Bible on parle de la pierre angulaire.

    Voila ma petite reflexion a ce sujet.

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