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Ecosia : Le Moteur De Recherch

20 janvier 2009 2 20 /01 /janvier /2009 12:14
Invitation au voyage

Mise à jour le lundi 19 janvier 2009 à 15 h 18

Hélène Dorion, Hublot des heures
 

À première vue, elle semble fragile. Charpente frêle d'elfe. Pourtant, en entrevue avec Radio-Canada.ca, Hélène Dorion se révèle une femme solide. Un être solidement ancré dans la réalité, dont la voix grave d'alto module ses mots tout en douceur. Poète? Bien sûr! Elle a publié plus de 15 recueils depuis 1983.

Le dernier, Le hublot des heures, est une invitation au voyage. Authentique. Mais pas question de voir « sur ces canaux dormir ces vaisseaux dont l'humeur est vagabonde », chantés par Baudelaire. Hélène Dorion est femme du XXIe siècle: elle prend l'avion et le train. Avec tous les plaisirs et les inconvénients:

« Tu rouvres les yeux,
et le carré rouge
apparaît sur l'écran
qui annonce le retard de ton vol. »

Carrousel de bagages, promiscuité, retards, angoisse des autres. Rien n'échappe à son regard.

La poésie, clé de la réalité

Elle s'interdit d'être une poète enfermée dans sa tour d'ivoire, de béton ou de verre, perdue dans ses ailleurs, avec de petits oiseaux plein la tête. La poésie l'amène à entrer davantage dans la réalité.

Pour moi, c'est une plongée au coeur de la réalité et, bien sûr, dans ce livre-ci, toutes les dimensions du voyage.

— Hélène Dorion

Le hublot des heures, un récit poétique, raconte l'expérience du voyage. Une expérience qu'Hélène Dorion a acquise en voyageant beaucoup, dit-elle, pour le travail principalement. Elle suit ses livres, dit-elle, qui ont été traduits dans plus de 15 pays. Elle part quatre ou cinq fois par année.

Donc, j'ai eu envie de faire l'expérience de l'ailleurs et d'entrer dans cet ailleurs.

— Hélène Dorion

Dialoguer avec la vie

Son héroïne est une femme qui écrit en déplacement. Elle se déplace, dit Hélène Dorion, par rapport à elle-même, pour apprendre de ce monde-là. « Se déplacer, c'est être autre, dit-elle, c'est être en mouvement. Pour moi, bouger, se déplacer, mais pas dans l'agitation, mais au contraire entrer dans le mouvement, c'est entrer en dialogue avec la vie. »

Être figé équivaut, pour elle, à refuser de dialoguer avec la vie.

C'est fondamental, ce dialogue avec la vie. Donc, avec le monde contemporain dans lequel on vit.

— Hélène Dorion

Le monde contemporain, elle le revendique, non seulement en entrevue, mais aussi dans son livre. Elle le questionne. Elle y parle, par exemple, de Las Vegas, sans nommer la ville des illusions.

On reproduit des lieux. On n'est plus seulement dans un ailleurs, on est dans l'illusion d'un ailleurs, dans un faux ailleurs. Il me semble qu'on ne peut pas vivre ça sans le questionner.

— Hélène Dorion

Entre réel et virtuel

Pourquoi le questionner? Pour accroître notre lucidité, notre présence au monde, répond la poète, pour qui c'est le rôle même de la poésie. C'est pourquoi elle pose la question du rapport entre le vrai et le virtuel.

L'auteure constate que des gens vivent complètement sur Internet, qu'ils donnent leur vie au virtuel. Malgré ça, Hélène Dorion refuse de diaboliser le web. Pour elle, le problème n'est pas là, mais dans le rapport qu'on entretient avec lui.

« Peu importe à qui on donne son âme, ça peut de toute façon créer un vide intérieur. Qu'on donne son âme à la réalité, au quotidien, ou qu'on soit submergé par Internet, qu'on ne soit plus capable de décoller d'un écran, pour moi, c'est exactement la même chose. Il faut retrouver le rapport à soi », insiste l'auteure.

La liberté, c'est la capacité de choisir

Selon elle, préserver le contact avec sa propre identité et avec l'humanité qui la définit est primordial. Pour cela, il faut garder, dit-elle, ce qui est fondamental chez l'être humain: la liberté. Qu'elle définit comme la capacité de choisir.

La première chose qu'on fait sur Internet, on choisit. On ne fait que choisir sur Internet. À un moment donné, on peut aussi perdre la conscience de la liberté comme instrument fondamental.

— Hélène Dorion

Comment l'être humain, confronté au choix multiple des instruments qu'on lui propose quotidiennement, « ...tondeuses, souffleuses, climatiseurs, scies sauteuses... »; comment, confronté à ce que la poète appelle l'instrumentation de la vie, peut-il retrouver un espace de liberté? Par la parole, répond-elle. Et elle cite le philosophe allemand Martin Heidegger: « Le langage, c'est la maison de l'être. »

Dans la mesure où le langage est atrophié, c'est aussi l'identité, c'est aussi la conscience qui est atrophiée.

— Hélène Dorion

C'est pour ça qu'Hélène Dorion écrit.

Pour réduire l'atrophie en chacun de nous. Pour appréhender le monde, le rendre accessible aux autres et à elle-même, pour que quelque chose grandisse en chacun de nous, en ouvrant pour nous ce monde

« ...plein de futur jamais
décodé où l'on s'engouffre
comme des taupes.... »

Le hublot des heures
Hélène Dorion
Édition de la différence
Collection Clepsydre

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